Le 49.3 pour la loi influenceurs ?
Annonces de Bruno Le Maire. Définir l'Influence Responsable. Magali Berdah.

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TLDR ;)
Nous devions être fixés lundi 20 Mars sur la ligne du gouvernement concernant le projet de loi “influence” en cours d’étude à l’Assemblée, mais la réunion a été reportée au Vendredi 24 Mars 9h30.
Définir ce qu’est une “Influence Responsable” n’est pas aisé car beaucoup de notions se bousculent (transparence, dropshipping, secteurs régulés, surconsommation, environnement, mineurs, …). Je tente ici une proposition.
“Coup de comm” et #ResponsibleWashing de Magali Berdah avec le lancement de la FICC (Fédération des Influenceurs et des Créateurs de contenu) : du culot, du courage aussi, un manque de crédibilité (sauf peut-être auprès des KOLs de la télé-réalité). Peut-être que cette démarche aura le mérite d’engager Magali Berdah, ainsi que les influenceurs de la télé-réalité, dans une démarche responsable ?
Les annonces à venir (Vendredi 24 Mars donc)
Le Ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire présentera vendredi 24 Mars à 9h30 (au lieu du lundi 20 Mars initialement) les décisions qu'il a prises concernant la régulation du Marketing d’Influence, en présence des députés qui ont été impliqués sur les projets de lois.
J’aurai le plaisir d’y participer (90 parties prenantes sont annoncées !), et je ne manquerai pas de vous en partager les éléments intéressants.
Les mesures qui seront annoncées seront bien entendu amenées à évoluer avec le débat parlementaire (non a priori, pas de 49.3), mais l'idée est de partager la ligne du gouvernement.
Le point de vue du Ministre, qui nous a été rappelé cette semaine, semble clair : le secteur du marketing d’influence est en pleine expansion, plein d'innovation, il ne faut pas en limiter la capacité de développement à travers des règles trop contraignantes. Néanmoins, force est de constater que les règles existantes ne sont pas claires et qu’il existe des excès.
Alors à quoi s’attendre vendredi ?
Périmètre de la loi, définition du marketing d'influence, rôle des agents, secteurs concernés par une éventuelle interdiction du marketing d’influence, volet répressif, ...
A suivre.
Mais au fait, qu’est-ce que l’”Influence Responsable” ?
Fermez les yeux un instant et réfléchissez. Comment définiriez-vous simplement l’“Influence Responsable” ?
Tout le monde en parle, mais elle n’est pas si aisée à définir.
Je pose souvent la question à mes contacts dans le secteur de l’influence… et ils n’ont pas la réponse facilement.
Car cette expression évoque instantanément de très nombreuses idées :
L’approche de l’ARPP, précurseur sur la transparence (#partenariatrémunéré) et sur la création d’un certificat, avec des approches sectorielles (par exemple pour lutter contre le #greenwashing dans les contenus des KOLs)
Diverses chartes de l’influence responsable (L’Oréal, l’agence Woo…) , qui évoquent, outre la transparence, des interdictions de pratiques (dropshipping) ou des interdictions sectorielles (produits financiers, santé, etc.), des limitations de volumes de collaborations pour les KOLs (exemple : moins de 30% de leurs posts liés à des marques), ou des limitations de pratiques concernant les mineurs (qu’il s’agisse de KOLs mineurs, des enfants des KOLs qui apparaissent dans les posts, ou de l’audience des KOLs qui peut être significativement constituée de mineurs)
Les actions du récent collectif PayeTonInfluence qui milite activement pour prendre en compte l’impact écologique du marketing d’influence : des produits, des campagnes, du bilan carbone des KOLs qui se déplacent beaucoup, etc.
Le phénomène de la désinfluence qui consiste, pour des KOLs, à dissuader l’acte d’achat (ce qui est une forme d’influence)
Etc.
Une recherche sur google ne vous aidera pas beaucoup, même si la définition de Définitions Marketing (créé seulement récemment en janvier 2023) est assez complète.
Même si toutes les actions de marketing d’influence ne sont pas assimilables à de la publicité (voir NL précédentes), on peut également s’inspirer de la définition de Publicité Responsable fournie par l’ADEM (orientée transition écologique bien entendu)
Selon moi, le marketing d’influence responsable ne peut pas être limité aux pratiques ayant pour objectif la promotion d’une consommation plus écologique, plus juste ou plus responsable. Il ne peut pas non plus être limité aux pratiques publicitaires.
Il me semble que la notion de “responsabilité” est d'ordre moral philosophique avant d'être d'ordre légal, mais elle intègre bien les deux.
Je me risque à une définition ?
Le marketing d'influence responsable est la pratique du marketing d’influence respectueuse à la fois de la loi, mais aussi des principes éthiques du secteur.
Ce qu’il faut faire pour respecter la loi :
Transparence des pratiques : identification explicite et instantanée du caractère commercial ou sponsorisé des messages
Respect du cadre légal (notamment les mentions légales obligatoires) pour la promotion de produits ou services réglementés : alcool, jeux d’argents, produits financiers, santé, etc. …
Absence d’informations inexactes ou incomplètes ayant pour but d’inciter le consommateur à acheter rapidement : niveau de promotion, origine du produit, nombres de visites et commandes en cours ou passées, avis clients, délais de livraison, etc.
Non promotion de produits ou services illicites, non conformes et dangereux au regard de la réglementation en vigueur, ou qui ne seront jamais livrés ou fournis à l’acheteur
Respect de la loi Studer pour protéger les enfants influenceurs : consentement, déclaration, argent versé sur un compte bloqué jusqu’à la majorité, …
Non recours à des filtres embellissants la peau, les yeux, les cheveux… pour faire la promotion de produits de beauté
Ce qu’il faut faire pour respecter les principes éthiques du secteur :
Absence de falsification des données : achats de followers, de likes, de commentaires, … mais aussi non participation à des pods d’influenceurs
Ne pas inciter à la surconsommation : limitation du volume de posts mentionnant des marques parmi les publications des KOLs, …
Ne pas envoyer des produits non explicitement demandés ou acceptés par les KOLs
Prise en compte du caractère influençable du jeune public (mineurs)
Absence de mineurs sur les photos ou vidéos, ou, si présence, le faire dans le cadre légal
Prise en compte des contraintes environnementales des produits et services promus
Prise en compte des contraintes environnementales des modes de collaboration (impact carbone des déplacement, des tournages, etc.)
Transparence des intermédiaires : exclusivité, marges, etc.
Transparence fiscale
Magali Berdah lance la FICC, “non mais Allo! quoi !”
La nouvelle venait de sortir, mais je n’avais pas pris le temps d’en parler lors de ma dernière newsletter.
Oui, vous avez bien lu. Magali Berdah a annoncé le 7 mars dernier la création de sa propre fédération pour encadrer le secteur de l’influence, et “aider les influenceurs à être mieux formés vis-à-vis de la réglementation” (plus d’infos ici sur Gens d’Internet).
Association de loi 1901, la FICC (Fédération des Influenceurs et des Créateurs de contenu) est presque l’homonyme de l’UMICC (Union des Métiers de l’Influence et des Créateurs de contenu), mais semble s’adresser avant tout aux influenceurs.
Que penser de la légitimité d’une telle démarche, quand on sait que les “dérives” (arnaques, dropshipping, non respect du code du commerce, …) dont la FICC devraient nous prévenir (et prévenir les KOLs), sont celles qui ont été instaurées et cultivées notamment par l’agence Shauna Events de Magali Berdah.
Les acteurs du marché ont été surpris, à commencer par les influenceurs qui ont critiqué à coeur joie la démarche.
Il ne faut cependant pas sous-estimer l’influence encore forte de Magali Berdah auprès des influenceurs de la télé-réalité (avec qui elle continue de travailler dans le cadre de sa nouvelle agence de marketing d’influence). Elle a d’ailleurs déjà annoncé qu’une 100aine de KOLs seraient intéressé(e)s pour rejoindre l’initiative…
Tout le monde a le droit à une deuxième chance, Magali Berdah aussi.
Mais faut-il pour autant croire en la sincérité de cette démarche ? Je ne crois pas, car si cela avait été le cas, elle se serait accompagnée d’un “mea culpa” de la part de Magali Berdah, d’une reconnaissance d’erreurs passées par exemple, et d’une mise en perspective de la FICC dans cette démarche de “rédemption”. A ma connaissance cela n’a pas été le cas (chers lecteurs, peut-être avez-vous plus d’informations que moi là dessus ?). Au contraire, Magali Berdah s’est toujours présentée en victime (ce qu’elle a été malheureusement concernant le harcèlement qu’elle a subi).
Que faut-il donc conclure sur la FICC :
Culot incroyable d’un côté,
Courage aussi peut-être qu’il faut reconnaitre à Magali Berdah (elle a osé quand même),
Absence totale de crédibilité sur le marché c’est une certitude
Mais probablement une crédibilité auprès de ses “fidèles” (même s’ils devraient plutôt s’orienter vers l’UMICC qui est aussi destinée aux KOLs)
Bref, un “coup de comm” (attention au #ResponsibleWashing) qui aura peut-être le mérite d’engager Magali Berdah, ainsi que les influenceurs de la télé-réalité, dans une démarche responsable.
Il faudra surtout veiller à ce que plus aucun abus ne soit constaté de son côté. Notre secteur, qui est en train de lutter difficilement pour corriger la mauvaise image qui a pu lui coller à la peau, aura du mal à s’en relever sur le long terme.
Et j’ose faire un (double) rêve : que les medias arrêtent d’appeler Magali Berdah “la papesse des influenceurs”, et surtout que les media ne lui donnent plus toute cette visibilité dès qu’elle souhaite s’exprimer.
Il y a tellement d’autres initiatives plus légitimes et inspirantes sur le marché du marketing d’influence !
J’espère que cette newsletter vous a plu.
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