Name & Shame
Name & Shame à la DGCCRF. TikTok contre attaque. Stop au cyber-harcèlement. Fonds inclusif Pinterest. Sephora et TikTok s'engagent pour la diversité !
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TLDR ;)
6 influenceurs condamnés par la DGCCRF à révéler, sur leurs réseaux sociaux, leurs infractions à la loi. Confirmation du “name & shame” promis par Bruno Le Maire. C’est le buzz de la semaine.
Au delà de la non indication du caractère commercial, plusieurs faits reprochés sont potentiellement graves pour les consommateurs (arnaques CPF, allégation de compositions de produits, actes de chirurgie illicites, etc.)
TikTok désormais interdit dans l’Etat du Montana (USA), mais TikTok poursuit ce même Etat pour non respect du 1er amendement (liberté d’expression). Qui aura le dernier mot ?
Une commission d’enquête sur TikTok a été lancée au Sénat en mars. Pourquoi ne pas l’étendre aux autres réseaux sociaux ?
Nouveau drame dû au cyber-harcèlement en France, il est urgent d’accélérer les programmes en cours (Phare), et de soutenir les associations comme Génération Numérique et Marion la Main Tendue qui font un travail incroyable sur le terrain.
Plus que 2 jours pour postuler au Fonds Inclusif pour la Création de Pinterest
Sephora et TikTok soutiennent les entrepreneur(e)s et les KOLs issu(e)s de la diversité à travers un nouvel incubateur Sephora x TikTok
Name & Shame
Dans la dernière édition, je revenais sur les contrôles de la DGCCRF portant sur 50 KOLs (voir ici), dont 30 seraient dans l’illégalité. Le gouvernement avait annoncé une politique de “name & shame” : c’est désormais chose faite ! Et ça fait le buzz.
En début de semaine dernière, deux influenceurs, Illan Castronovo (2,2M followers Instagram, et Simon Castaldi (342k) ont diffusé des posts sur leurs comptes Instagram et chaînes Telegram révélant une “injonction” de la DGCCRF sur leurs réseaux sociaux pour condamner des “pratiques commerciales trompeuses au sens du code de la consommation”, ou bien “de la publicité cachée”.
Ce qui leur est reproché notamment :
affirme d’un service de conseil en paris sportifs qu’il augmente les chances de gagner aux jeux d’argent et de hasard,
donne l’impression qu’un service de reversement en argent d’une partie du solde du Compte Personnel de Formation en contrepartie d’une simple inscription à une formation est licite alors qu’il ne l’est pas,
n’indique pas l’intention commerciale de ses publications à visée publicitaire,
n'indique pas les marques pour lesquelles il réalise ces communications.
Et vendredi dernier, la DGCCRF a également diffusé une liste de 6 influenceurs (dont I. Castronovo et S. Castaldi) qui ont reçu cette même injonction. On y retrouve pèle mêle @capucineanavoff (1,6M followers sur Instagram), @debledgaetan (52k), @leadorables (246k), @anthonymateo_off (1M followers)
Parmi les faits reprochés, il y a toujours la non indication de l’intention commerciale, mais aussi par exemple :
utilise comme argument de promotion l’absence de Bisphenol A dans des biberons et tétines, alors que cette absence de substance est une obligation légale
allègue sur une composition de produits, leurs qualités ou leur bienfaits alors que ces informations sont non justifiées
assure la promotion d’un dispositif dit de « patchs Mobiles anti-ondes » dont les les propriétés et résultats ne sont pas démontrés par des éléments scientifiques probants.
donne l’impression qu’un service présenté par l’influenceur est licite alors qu’il ne l’est pas. En l’espèce, présente des prestations d’injections d’acide hyaluronique réalisées par une esthéticienne ne disposant pas de la qualité de médecin requise pour effectuer de tels actes médicaux tromp(ant) le consommateur sur la licéité du service présenté.
Au delà de ces 6 noms, personne n’a connaissance de la liste des 30 créateurs en infraction, il est donc difficile de faire une véritable analyse à ce stade. Que faut-il en penser ?
D’un côté on ne peut pas savoir si ces faits reprochés ont été ponctuels, et s’ils remontent à plusieurs mois, voire années. Est-ce qu’il a également été donné l’occasion aux personnes concernées de corriger leurs erreurs afin de ne plus les reproduire ?
Il me semble que la DGCCRF n’aurait pas pris le risque du “name & shame” s’ils ne s’agissait pas de cas significatifs et portant atteinte à la sécurité des consommateurs (ce qui est le cas vu les faits reprochés, et le pouvoir important de prescription des KOLs), mais nous n’avons pas de précisions là dessus.
Tout procédé visant à protéger les consommateurs ainsi que les plus jeunes est nécessaire, et le “name & shame” a été demandé par un grand nombre d’acteurs à plusieurs reprises lors des tables ronde de l’influence à Bercy. Il faut donc l’assumer.
Il faudra toutefois éviter de créer un amalgame entre celui/celle qui commet sciemment des arnaques, et les autres.
D’un autre côté, je pense que cette démarche de la DGCCRF va faire bouger les choses vers des pratiques de marketing d’influence plus responsables ! Au delà de l’impact médiatique (sur les réseaux sociaux et sur les medias plus traditionnels), l’ensemble des acteurs (KOLs, agents, agences, annonceurs) seront, à partir de cette semaine, encore plus vigilants sur le respect de la loi et des bonnes pratiques qu’ils vont étudier (et appliquer) encore plus en détail.
En témoigne ci-dessous la réaction de l’influenceuse @montessorialamaison (124k followers Instagram), suite à la publication de l’injonction de @leadorables.
Il se passe quelque chose.
Il se passe aussi quelque chose sur le compte Instagram de la FFL - Fédération Française de la lose, qui nous rappelle qu’il n’est pas interdit de prendre cette actualité avec humour. Merci à eux ! :-)
TikTok ennemi public ?
Vous avez suivi les polémiques relatives à TikTok dans de nombreux pays qui ont interdit l’application (Inde par exemple), ou cherchent à le faire en limitant les usages (dans les administrations par exemple), notamment en raison évoquée de la sécurité des données.
Aux Etats-Unis, c’est désormais l’Etat du Montana qui a décidé d’interdire purement et simplement TikTok (voir ici). Mais TikTok a contre attaqué la semaine dernière en poursuivant l’Etat du Montana, proclamant que l’interdiction allait à l’encontre du 1er Amendement relatif à la liberté d’expression (voir ici). L’enjeu est de taille, car le risque est que cette interdiction s’étende à d’autres Etats des Etats-Unis.
En France le Sénat a lancé une enquête le 13 mars dernier, partant du constat que certains pays “affirment que TikTok constitue un instrument potentiel de désinformation ou de manipulation au profit de régimes non démocratiques, et que son utilisation n'est pas sûre au regard de la nécessaire protection des données.”
Mais les interrogations du Sénat vont plus loin, “le succès impressionnant de ce réseau social, qui compte désormais 15 millions d'utilisateurs actifs en France, rend nécessaire de dissiper certaines zones d’ombre : comment fonctionne son algorithme ? Pourquoi est-il plus addictif que d’autres réseaux ? A-t-il des effets néfastes sur le développement du cerveau des adolescents et des enfants ?”
De questions légitimes, que l’on devrait probablement étendre à tous les réseaux sociaux : pourquoi se focaliser uniquement sur TikTok ? La commission d’enquête s’est engagée à “faire toute la lumière sur ces questions et de formuler des recommandations”. A suivre.
Derrière des aspects politiques et sociétaux, on comprend qu’il y a également des enjeux économiques et stratégiques pour tous les autres réseaux sociaux qui luttent désormais contre la révolution TikTok. La filiale de Bytedance attire tant d’utilisateurs, d’annonceurs et de créateurs, que les autres plateformes s’en inspirent systématiquement pour leurs nouvelles fonctionnalités (voir l’excellent article de The Economist sur le sujet ici). Une véritable lutte d’influence (dans l’influence) s’est engagée entre réseaux sociaux, une belle mise en abîme.
Mettre fin au cyber-harcèlement sur les réseaux sociaux
L’influence responsable passe aussi par des réseaux sociaux responsables.
Le cyber-harcèlement a fait malheureusement de nouveau parler de lui cette semaine avec un drame : le suicide de Lindsay, une adolescente de 13 ans qui aurait été victime de harcèlement scolaire. Les réseaux sociaux sont pointés du doigt, mais aussi le rectorat et les services de police (en savoir plus ici).
Le Ministre Pap Ndiaye a annoncé un « renforcement de la cellule de lutte contre le harcèlement ». Le programme de lutte contre le harcèlement à l’école (pHARe), expérimenté depuis 2019 dans 6 académies, doit achever cette année sa généralisation (91 % des collèges et 64 % des écoles déjà inscrits).
Rappelons les numéros d’aide d’urgence 30 20 (pour familles et victimes), et 30 18 (cyberharcèlement).
De nombreuses associations interviennent également pour lutter contre les limites des réseaux sociaux, en particulier le cyber-harcèlement. En France, Kolsquare soutient par exemple le travail formidable de :
Génération Numérique (400,000 enfants formés chaque année dans les collèges et écoles) : pour faire un don => ici !
Marion la Main Tendue (sensibilisation en milieux scolaires, formation des enseignants, recherche, accompagnement thérapeutique des victimes et auteurs) : pour faire un don => ici !
(Re)découvrez l’engagement poignant de Nora Fraisse, dont la fille Marion s’est suicidée à l’âge de 13 ans après avoir été harcelée au collège et qui combat le harcèlement scolaire avec son association Marion la Main Tendue. Le media Brut a republié cette semaine une vidéo tournée en 2021.
Fonds inclusif pour la Création by Pinterest
Parler d’influence responsable, ce n’est pas que parler de lois, d’arnaques, de cyber-harcèlement ou de manipulation de civilisation. Il y a aussi de nombreuses initiatives positives dans le secteur du marketing d’influence.
Cette semaine j’ai envie de relayer l’initiative de Pinterest qui étend enfin en France le Fonds Inclusif pour la Création (après 3 années aux États-Unis).
L’objectif : offrir plus d’opportunités pour aider les KOLs se considérant comme membres de communautés sous-représentées à émerger, progresser, à interagir et, in fine, à réussir sur Pinterest.
Concrètement, il s’agit de 4 semaines de formations pour apprendre et progresser grâce à des experts Pinterest et diverses personnalités créatives.
Les participations sont ouvertes jusqu’au mardi 6 juin 2023 à 21h (UTC+2) ! Et pour postuler c’est ici !
Sephora et TikTok s’engagent pour des partenariats plus inclusifs !
Sephora s’engage depuis 2015 à soutenir les entrepreneurs issus des minorités au sein de son programme [Accelerate], avec tout d’abord un focus sur les femmes entrepreneurs, puis depuis 2020 un recentrage sur les entrepreneur(e)s issues de la communauté BIPOC (pour “Black, Indigenous and People Of Color”, qui fait référence aux Noirs, aux Autochtones et aux personnes de couleur).
Cet engagement a pris une nouvelle dimension depuis mars 2023 à travers la création d’un incubateur Sephora x TikTok. Celui ci permettra en 2023 à 12 participant(e)s du programme [Accelerate] Sephora de développer leur communauté et leur business sur TikTok, via des formations dédiées (stratégie social media), mais aussi des mises en relations avec des KOLs TikTok de référence aux profils multiculturels.
"L'avenir du storytelling des marques est entre les mains des créateurs multiculturels, et en défendant des créateurs divers, les marques peuvent libérer leur plein potentiel sur TikTok", a déclaré Soniya Monga, responsable des partenariats avec les agences américaines, TikTok. "Ensemble, nous construisons un cadre qui célèbre la diversité et l'intersectionnalité, en veillant à ce que chaque marque puisse accélérer sa croissance et son succès sur TikTok grâce à un storytelling inclusif et impactant."
On ne peut que saluer cette initiative, en espérant qu’elle inspire de nombreux autres annonceurs et créateurs ! En savoir plus ici.
J’espère que cette newsletter vous a plu.
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